Le momentum est parfait. Une semaine après le jugement du ministre de la Justice par la Cour de Justice républicaine, l’Université de Nîmes organisait ce jeudi 7 décembre un colloque en l’honneur des 30 ans de cette institution contestée. Mélanger juridique et politique ne fait pas bon ménage selon ses détracteurs.
30 ans, ça se fête. Le département de droit économie gestion de l’Université célèbre cet anniversaire pour cette institution juridique très particulière. À travers ce colloque, prévu depuis plus d'un an, les intervenants analysent ces procès et les questions se posent.
« Y a-t-il une autre formule qui pourrait rendre cette institution plus acceptée par la majorité des citoyens ? », interroge Maître Cantier, connaissant bien cette Cour pour y avoir défendu l’ancien ministre Kader Raif, finalement condamné et reconnu coupable de favoritisme.
9 décisions en 30 ans
En 30 ans, neuf décisions sont rendues par la Cour de justice de la République. Dans un amphithéâtre de l’Unimes ce matin, sept étudiants en Master 2 présentent et analysent chacun des procès de cette institution d’exception créée pour juger les crimes ou délits commis par les membres du gouvernement dans l’exercice de leurs fonctions.
La première ? Le scandale sanitaire du sang contaminé (1999). S’en suivent celles de Ségolène Royal (2000), Michel Gillibert (2004), Charles Pasqua (2010), Christine Lagarde (2016), Jean-Jacques Urvoas (2019), Édouard Balladur et François Léotard (2021) et Kader Arif (2022). Plus récemment, il y a une semaine, l’institution juridique a relaxé le Garde des Sceaux, Éric Dupont Moretti, accusé de prise illégale d’intérêts.
Le problème avec cette institution ? « On lui demande d’être deux versions d’elle-même à la fois : une version pénale, avec ses bases légales et constitutionnelles et une version politique, un peu comme le ferait un équilibriste sur son fil en prenant en compte la dimension morale et l’éthique. C’est extrêmement difficile d’opérer ce compromis entre les deux faces de la médaille », commente Sylvie Salles, maître de conférence en droit public à l’Université de Nîmes.
«Journée scientifique au niveau national»
Après les analyses, place au débat. Dans l’après-midi, Julien Bonnet, président de l’association française du droit constitutionnel, a donné le ton d’une mise en perspective culturelle et sociologique, avant une table ronde. À cette dernière, de nombreux acteurs du monde de la justice connaissant bien cette juridiction exceptionnelle. Pour Sylvie Salles, ces invités « honorent et labellisent notre journée scientifique au niveau national ».
La Cour de justice de la République est souvent critiquée pour sa complaisance supposée envers les anciens ministres et ses délais de jugement. Pour l’avocat François Cantier, ayant siégé à la Cour pénale internationale, « l’idéal est dans tous les esprits, mais n’est jamais dans la réalité. On peut penser à des systèmes moins critiquables que l’actuel, mais seront-ils plus efficaces ? Satisferont-ils tout le monde ? Je n’en suis pas sûr ».
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