C’est une première à Nîmes. La communauté tchétchène prend les devants pour organiser la commémoration des 80 ans de la déportation du peuple tchétchène et Ingouche vers l’Asie centrale par l’Union soviétique de Staline. Cette déportation a été qualifiée de génocide par une résolution du Parlement européen en 2004.
Le cauchemar débute le 23 février 1944. Ce jour, près de 120 000 soldats soviétiques encerclent les villes de la République socialiste soviétique autonome de Tchétchénie-Ingouchie. Un demi-million d’habitants sont alors transportés dans des wagons à bestiaux et sont transportés, sans eau ni nourriture, vers le Kazakhstan, le Kirghizistan ou la Sibérie. C’est le début de l’opération Tchétchévitsa.
« Les hommes étaient sur le front face aux nazis à ce moment-là. Les soldats avaient amené les femmes, les enfants, les vieillards. À la fin de la guerre, quand ils sont entrés, eux aussi se sont fait déporter. Leur condition de retour c’était ça, abandonnez vos terres et vos maisons », raconte Beslan Tatayev dont la grand-mère, 86 ans aujourd’hui, a vécu cette déportation et l’exil qui s’en est suivi.
«Un moment de souvenirs, une célébration de notre culture et force»
« Cet événement a profondément marqué notre histoire et notre mémoire collective, dit ce français d’origine tchétchène, à la tête de l’association AAISP du Gard. En 1956, 355 000 Tchétchènes et Ingouches sont comptabilisés au Kazakhstan et 76 986 au Kirghizistan. Beaucoup meurent lors de cette opération, ces communautés ne seront rétablies qu’à la mort de Staline.
« Parce que c’est l’anniversaire des 80 ans, on s’est dit qu’on allait faire quelque chose », explique ce nouveau représentant de la communauté tchétchène à Nîmes. « Cette cérémonie sera non seulement un moment de souvenir, mais aussi une célébration de notre culture et de notre force », annonce l’organisateur de l’événement de ce vendredi 1er mars, à partir de 18 heures, au Centre socioculturel et sportif Simone Veil.
Au programme ? Une présentation en amphithéâtre sur l’histoire de la déportation, suivie d’un moment de convivialité autour d’un buffet mettant à l’honneur des plats traditionnels tchétchènes et ingouches.
Polémiques
Des commémorations similaires sont organisées de partout dans le monde par la diaspora tchétchène. En Russie, ce fait historique est toujours l’objet de controverses. Après avoir lancé la seconde guerre de Tchétchénie en 1999, Vladimir Poutine avait, en 2001, présentait sa « sincère compassion » aux victimes de la déportation du peuple tchétchène par Staline.
Ce nettoyage ethnique fait à nouveau couler de l’encre en septembre dernier. Selon nos confrères de L’indépendant, le nouveau manuel scolaire des enfants tchétchènes justifierait la déportation de 600 000 Tchétchènes, accusés faussement de collaboration avec l’Allemagne nazie pendant la Seconde Guerre mondiale. En 2004, le Parlement européen adoptait une résolution qualifiant de «génocide» ces faits.
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