À l’approche d’une demi-finale de Coupe du monde déjà historique entre la France et le Maroc, la tension monte. À Nîmes, les amoureux du foot s’enthousiasment dans les quartiers populaires où la diaspora marocaine est très présente. Et ce, même si la crainte de débordements violents plane comme une épée de Damoclès.
« Quoi qu’il arrive, on ne sera pas déçu », dit Mohammed Afkour arrivé en France à l’âge de 9 ans en provenance du Maroc. Amoureux de football, il a été président du club Jeunesse sportive Chemin Bas d’Avignon pendant 7 ans. Il est aujourd’hui entraîneur des U14. L’affiche internationale de ce mercredi soir est parfaite selon lui.
« Mais ça va être difficile de supporter une équipe, dit-il. Dans notre vie, on a plus supporté l’équipe de France que le Maroc. Le Maroc n’a pas connu autant de gloire. Le fait qu’ils arrivent là, ça ne va pas arriver souvent à mon avis ».
Il affirme éprouver un certain penchant à soutenir « ce petit poucet de la compétition », comme beaucoup. « On espère que ce soit une fête, qu’il n’y ait pas de débordement, qu’on fête la victoire dans la bonne humeur, la joie ».
La ZUP entre euphorie et crainte
Hicham Abderrezak est, quant à lui, président du principal club de l’autre gros quartier populaire de la ville : le CO Nîmes Soleil Levant. Parmi les licenciés, « il y a énormément de binationaux à la double culture franco-marocaine », rapporte-il, estimant leur nombre entre 30 et 40 %. Il témoigne que les jeunes vivent un « réel enthousiasme, une excitation, une attente importante », par rapport à ce match.
Le club de foot Nîmes Soleil Levant affirme avoir demandé à la mairie de Nîmes l’accès à l’espace Léon Vergnole pour réunir jeunes et habitants autour des matchs. Il explique que la Ville a refusé pour différentes raisons telles que la conciergerie, les économies d'énergie et les droits TV pour diffuser dans un lieu public.
Mais dans les quartiers de Pissevin-Valdegour, l’appréhension de débordements est présente dans toutes les têtes. Azouz Raouf, directeur de l’association Mille couleurs et trésorier du comité de quartier, se dit très inquiet. « Les jeunes vont aller voir le match dans des bars en centre-ville, puis redescendent à la ZUP “pour mettre le feu”, comme ils disent ».
À Nîmes c’est la fête en marge de la victoire du Maroc face aux espagnols. Toujours dans la joie et la bonne humeur pic.twitter.com/9UzPSbp7lm
— soldat du rif (@LeMaquisDuRif) December 6, 2022
« Canarder au mortier les bus et les forces de l’ordre »
Il cite en exemple les évènements après la victoire du Maroc face à l’Espagne et le Portugal. « Malgré la liesse populaire et les personnes honnêtes qui font fête, d’autres personnes mal intentionnées se sont amusées à bloquer la circulation, à canarder au mortier les bus et les forces de l’ordre, à gâcher la vie de pas mal d’habitants du quartier ».
L’homme ne mâche pas ses mots face à ces comportements : « ce sont des abrutis, ils prennent plaisir à vouloir faire du mal ». Sur Facebook, l’association Mille Couleurs a publié un communiqué de presse, lundi, pour dénoncer ces actes et l’agression d’une responsable du Centre social Mille couleurs après la rencontre face à l'Espagne. Il dénonce des actes de malfaiteurs qui « encore une fois, produisent une image négative de la fraternité du quartier et du vivre ensemble ».
Appels à la prudence
Pour endiguer les débordements, l’association organise deux rencontres avec des jeunes du quartier. L’une d’entre elles était ce mardi soir, une rencontre entre des jeunes et le psychologue Nasser Rais. L’objectif était de confronter les jeunes sur la thématique du sport, de la France, du Maroc. « Il faut que les jeunes puissent se positionner en tant que français, marocains, franco-marocains », dit-il.
L’association Mille Couleurs a récemment demandé à la préfecture de créer une fan-zone entre la station Esso et la galerie Richard Wagner. Elle dit n’avoir obtenu aucune réponse. Pour le match, l’association lance un appel à ses adhérents : « restez chez vous, ne sortez pas, vous allez peut-être tomber sur des bandes de voyous qui vont en profiter ».
Les autorités sur le qui-vive
Interrogée par Le Réveil du Midi, la police nationale indique être prête pour faire face à de potentiels débordements. « On laisse s’amuser, on laisse s’exprimer la joie, mais on est prêt à intervenir en cas de violences », indique un responsable de la police à Nîmes.
La préfecture du Gard a quant à elle publié un communiqué de presse indiquant des mesures restrictives «au regard de la nécessité de sécuriser la soirée de demi-finale de Coupe du monde de football». La détention d'artifices, d'alcool et de produits inflammable sera interdite ce mercredi soir.
Vidéo des célébrations dans le centre-ville de Nîmes lors de la qualification des Lions de l'Atlas en huitième de finale :
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