Dès son plus jeune âge, Chantal Porras se découvre un talent pour le dessin, pourtant loin de s'imaginer 40 ans plus tard, laisser de côté son poste d'Atsem pour consacrer le plus clair de ses journées à l’atelier et aux galeries, où l'artiste nîmoise y expose désormais ses sublimes animaux d'argile et de bronze...
"Mes parents n'étaient pas sensibles à l'art", évoluant dans un milieu relativement éloigné du domaine des arts, ses parents imaginent difficilement un talent caché au creux des mains de Chantal, qui à première vue, n’est pas destinée aux grandes études. Comme beaucoup, difficile de croire en soi quand on vous répète que vous n'êtes "bon à rien".
Très tôt, son attrait pour le dessin l’amène à la sculpture à travers laquelle elle découvre le travail de la matière, en particulier celui de la terre cuite. Et c’est là que l’alchimie opère. "C'est très agréable, c'est un peu comme de la pâte à modeler, on reste en enfance".
L'amour de l'apprentissage, sa recette du succès
Elle réalise sa première exposition en 2011, à son domicile. Au départ elle réalise majoritairement des portraits, puis finit par se tourner vers la représentation animale « très en vogue ». Panthères noires, suricates, tatous, bonobos, chimpanzés… « La diversité des animaux qui existe est impressionnante, on n’en connaît que très peu finalement ».
La panthère noire "aux aguets", exposée au domicile de l'artiste. Crédit: G. Ohan-Tchélébian
Les bonobos, "en famille". Crédit: G. Ohan-Tchélébian
Encouragée par ses proches, à commencer par son mari, Daniel, son entourage professionnel lui permet en parallèle de basculer sur un temps partiel, afin de se consacrer pleinement à ses créations. "Restait à savoir ce je valais, est-ce que j’avais ma place parmi les professionnels ? ». Le poids du doute, maladie incurable des génies. Une seule manière de le savoir, se confronter aux autres.
Ainsi soit-il, en 2014 elle participe au « Salon National des Artistes Animaliers de Bry sur Marne », le plus prestigieux dans le domaine de l'art animalier. Là plus de place au doute: elle décroche la médaille d’argent, aux côtés de ceux qu’elle admire :"Je n’ai pas senti d’esprit de rivalité, on ne sculpte pas la même catégorie d’animaux ».
Le "renard des sables", son animal fétiche
Si Armand Pettersen lui, a décidé de se consacrer à la représentation des ours, elle, son animal "fétiche" c’est le fennec. Etonnant animal aux grandes oreilles, le plus petit de son espèce ! Très vite, elle est repérée et sollicitée pour exposer ses oeuvres en galerie.
Le fameux "fennec" signé Chantal Porras. Crédit: G. Ohan-Tchélébian
Représenter l'animal de la manière "la plus juste possible"
"J'aime beaucoup les suricates, ils me font bien rire", dressés au garde-à-vous sur les étagères de son atelier. Les animer, leur conférer une "personnalité", c'est ce qui anime l'artiste. Le fameux ciselage : le dessin des traits donnant toute "l’expression" à l’animal dit-elle. Attentif, reposé... effrayant ? « On peut tout faire avec la terre cuite !".
Son plaisir ultime, l'instant où le "bijou" apparaît enfin, une fois coulé dans le bronze à la fonderie, un travail titanesque :« Il y a énormément d’étapes avant de pouvoir apprécier l’oeuvre finale ». La lente maturation des oeuvres, atteignant parfois plusieurs mois, fait de cet art une sacrée besogne !
L'observation, clef de la représentation parfaite (ou presque)
Un apprentissage permanent... Pour exemple, il lui arrive de déposer un mouchoir humide sur le modèle, manière d'éviter que l'argile ne sèche trop rapidement. Elle expérimente aussi différentes façons de polir, « je me fabrique parfois mes propres outils".
Un conseil qu’elle donnerait à ceux qui hésitent « l’observation, la base pour reproduire fidèlement les éléments qui nous entourent ». Pour une espèce vivante, elle évoque le cou, les yeux, les traits du visage : « Bien qu’on a tendance au départ à vouloir reproduire les détails". L' artiste prône le fameux regard en entonnoir : les bases d’abord. La recette pour un travail parfaitement modelé…ou presque. Puisque comme elle le dit, à juste titre : "ce n'est jamais parfait, plus l'on progresse, plus l'on devient exigeant".
Pour ceux qui espèrent croiser "l'un de ses renards des sables", il faudra se rendre à Arles au mois d'avril dans la galerie Origines, où l'artiste y exposera ses derniers "petits"... !
Chantal Porras, l'artiste aux côtés de ses "suricates au garde-à-vous". Crédit: G. Ohan-Tchélébian