Le site du Pont-du-Gard est en pleine mutation structurelle, mais le spectacle du groupe F, reconduit pour 2 ans, a encore été un plaisir de l’œil et de l’esprit. « Une belle harmonie et une narration forte » saluait Patrick Malavieille, président de l’EPCC.
Histoire de la Méditerranée au travers de la romanité
Suivant la voix de Mohammed Kunda, peuples de forçats et vainqueurs ont couru sur l’eau et rempli les arches du monument. Une heure de tableaux tous « disant » d’une romanité observée par un esclave qui traverse les grandes guerres. De l’Egypte à la péninsule ibérique en passant par les Balkans et Palmyre, le site Unesco syrien désormais en péril... les portraits sacrés à la cire, la malédiction des «effaceurs de mémoire» qui vouaient les bannis à l’oubli même de leur nom, l’art consommé des maîtres romains pour « occuper et amuser leur peuple » et « aujourd’hui comme hier, les portes et les esprits ouverts ou fermés »… Le public, entre les cavaliers de lumière, les projections gigantesques, les flammes et la pyrotechnie et le vidéo-morphing, était captif de l’histoire de cet esclave condamné à la «crucifixion avec sursis» avant d’être « revendu en solde ». Une histoire qui n’en finissait pas de faire des allers-retours, échos d’hier à aujourd’hui.Patrimoine fondamental
«Tout le monde en a retenu quelque chose » réagit Patrick Malavieille.«Ce pont a été bâti lui-même avec des esclaves et des gens sous-payés. On a besoin de ce miroir qu’est l’histoire et ça relève de la vocation pédagogique du site. Le message sur les migrations est contemporain. Depuis la nuit des temps, il y a des déplacements liés à toutes sortes de situations. La planète est un gros village et il faut raisonner au niveau de la planète ». La référence aux différents sites «est un beau filon que nous aimerions travailler même avec les autres sites. A Palmyre comme en Afghanistan ou ailleurs, les terroristes s’attaquent aux pierres parce qu’elles portent la civilisation. Le patrimoine n’est pas toujours compris surtout en période de difficultés économiques, mais il est essentiel de le restaurer et le faire vivre» reprend-t-il heureux de voir que C. Nyssens l’arlésienne ministre de la culture veut réintroduire l’éducation artistique à l’école.
Unesco
Si Patrick Malavieille annonce vouloir« une vraie synergie Unesco avec Nîmes. Ca vient. On y travaille » il précise que « ça reste un sujet politique mais pas politicien », le patrimoine « est une mission particulière » et
« l’intemporel ne doit pas être affecté par le temporel. Nous avons tous à travailler ensemble ». Rien de formel, mais une collaboration avancée qui aboutira en 2018 avec le label Unesco pour Nîmes « nous irons plus loin que pour, par exemple, l’abbatiale de Saint-Gilles, pour proposer une offre « Romanité ». Les touristes aujourd’hui sont demandeurs et veulent comprendre
Petite jauge
Le 2 juin, ils n’étaient que 3 500 à prendre place au bord du Gardon pour la première et 4 500 le lendemain. «La moitié de l’an passé» commente un responsable, «le carambolage avec la feria se produit tous les 4 ans, mais il y a aussi les matchs de foot ou même les prévisions météo ». Les réservations du second week-end annonçaient plus de 8 000 spectateurs par soir. Les événements drainent toujours du public mais la baisse de fréquentation en un an atteindrait les 52% selon la logistique « près de 200 000 visiteurs en moins » s’inquiète t-on, pour partie attribuée à la nouvelle tarification jugée opaque « le public ne comprend pas, alors il ne vient pas. Ils ont perdu aussi la remise de 20% adossée à la carte». La disparition de Live au Pont ne relèvera pas la jauge « les cachets demandés par les artistes sont devenus trop lourds ».Food trucks
L’autre différence visible, ce sont ces food-trucks proposant jusqu’au kebbab de taureau. « C’est tendance » explique le président de l’EPCC « avec des produits de qualité. Nous allons même proposer des « spécialités du monde », c’est mieux que les sandwichs sous platique et ça fait travailler des gens » résume l’élu. « Comme une nostalgie du temps des gargotes » sourit Mathilde, inconditionnelle du Pont-du-Gard « depuis 30 ans » qui trouve que « c’est un peu cher maintenant, il faut payer les entrées et le reste. On vient moins souvent ».Gouvernance
Le directeur Paolo Toeschi assure l’intérim en attendant la nomination effective d’un nouveau directeur. Parmi les 5 noms sortis des 40 candidatures initiales, c’est celui de de Sébastien Arnaux, directeur adjoint du site (pôle exploitation et commercialisation) qui émerge avec insistance. Patrick Malavieille coupe court aux rumeurs d’attribution de la gestion du site à Culturespace, « pour le moment on reste sur la ligne EPCC ».*Fééries du Pont 2017, les Feux Romains. Tarifs : 25 euros adulte, 15 euros enfant, 23 euros réduit, 20 euros adulte abonné, gratuit pour les moins de 6 ans. Stationnement inclus dans le prix du billet.